Témoignage Héléna
J'ai bénéficié de l'intervention d'un AVS qui ne connaissait strictement rien de l'autisme, et j'ai fini par demander la suspension de ce service car il ne répondait absolument pas à mes besoins. Mon AVS n'était pas autorisé à intervenir auprès  
des professionnels de la santé lorsque je me rendais en consultation médicale, chez le dentiste ou autre), ni même à entrer en salle de consultation avec moi. Il m'avait dit qu'il pouvait éventuellement m'accompagner ( (et encore... cela ne faisait pas partie de ses attributions, il était payé pour m'accompagner dans des activités de loisirs, et rien d'autre) mais qu'il resterait dans la salle d' attente.  
Or, je n'ai aucunement besoin d'un "camarade de jeux et de promenade", j'ai besoin d'un accompagnement spécifique, c'est à dire d'une personne formée à l'autisme, qui soit capable de  
- et autorisée à - assister aux consultations et interventions médicales (médecin généraliste, dentiste, examens et soins divers (radios, doppler, kiné, etc.) et d'expliquer mes singularités  
aux soignants, fournir les informations que j'oublie de mentionner (par exemple, actuellement j'ai un problème de santé - le diagnostic n'est pas encore posé, j'ai des tas d'examens à faire, mais j'ai déjà un traitement médical... or lorsque je suis allée à la pharmacie  
avec mon ordonnance et que j'ai vu le pharmacien poser une montagne de boites sur le comptoir je me suis exclamée: "Tout ça ???!!! Mais pour quoi faire ?"  
Réponse du pharmacien: "C'est contre la douleur. C'est un puissant antalgique. Vous devez en prendre 3 à 4 comprimés par jour."  
Moi: "Mais pourquoi ? Ca agit sur quel organe ?"  
Le pharmacien: "Ce médicament-là ne soigne rien. Votre médecin a prescrit d'autres médicaments, qui eux sont destinés à soigner l'affection dont vous souffrez. Les boites que vous voyez là, ce sont juste des comprimés contre la douleur."  
Moi: "Mais je n'en n'ai pas besoin. Je n'ai pas mal."  
Le pharmacien: "Ah bon ?! Pourtant sur l'ordonnance il est mentionné que vous devez prendre 3 à 4 comprimés par jour pendant un mois, à renouveler si besoin."  
Moi: "Mais j'en veux pas de ce médicament. Gardez-les, ce serait du gaspillage car je ne les prendrai pas."  
Le phramacien: "Vous êtes sûre ? Vous n'avez pas de douleurs ?"  
Moi: "Ben, parfois je ressens une petite douleur, mais pas souvent, et c'est tout à fait supportable. Je n'ai vraiment pas besoin de prendre des antalgiques, et surtout pas de façon continue."  
Le pharmacien: "Emportez-les quand même, au lieu de suivre la prescription à la lettre, vous l'adapterez à vos besoins. Vous n'aurez qu'à prendre un comprimé quand la douleur sera trop forte."  
Moi: "Mais puisque je vous dis que je n'ai pas mal. De toute façon, j'ai du Doliprane chez moi, si un jour j'avais mal. Mais vous savez, j'en prends rarement des anti-douleurs."  
Le pharmacien: "Ha. Bon, c'est vous qui voyez. Je ne vous les mets pas, alors ?"  
Moi: "Non, s'il vous plait, gardez-les. Je ne veux pas acheter des médicaments que je ne consommerai pas."  
 
Bon, il est allé chercher les autres médicaments (indispensables ceux-là), m'a fourni toutes les explications concernant mon traitement, etc. Et au moment où je rangeais tout dans  
mon sac, prête à sortir de la pharmacie, il m'a demandé:  
"Vous êtes bien sûre pour les antalgiques, hein ? Vous ne regretterez pas de ne pas les avoir pris ?"  
Moi:" Mais oui, j'en suis bien sûre. Cela fait plus d'un mois que je me traine cette affection et je n'ai jamais eu besoin de prendre d'anti-douleur, je n'ai vraiment pas mal."  
 
J'ai réalisé, une fois de plus, que mon corps ne fonctionnait pas comme celui des personnes non-autistes. L'affection dont je suis atteinte actuellement est censée provoquer des douleurs physiques insupportables.  
 
Cela fait longtemps que je sais que j'ai un problème de perception de la douleur.  
Mais là cela m'a inquiétée, car je sais que la douleur est un signal d'alarme et que le fait que je ne la ressente pas, ou que je la ressente de façon très atténuée risque de fausser un diagnostic et de me faire passer à côté d'une maladie potentiellement mortelle  
(d'ailleurs cela m'est déjà arrivé plusieurs fois, je suis encore vivante parce que j'ai été alertée par des symptômes visibles et que je me suis rendue aux urgences à chaque fois.  
 
J'ai eu de la chance jusqu'à présent, j'ai frôlé la mort à plusieurs reprises, mais j'ai toujours été sauvée in extrémis. Mais qui sait si un jour je n'aurai pas une maladie engageant le pronostic vital sans symptômes visibles et dont le seul signal d'alarme serait une douleur que je ne ressentirai pas, ou qui ne sera pas assez intense pour m'inquiéter ?  
 
Présentement, le problème de santé qui m'est tombé dessus comporte heureusement des signes visibles extérieurement (et pourtant, j'ai quand même attendu plus d'un mois avant de me décider à aller chez le médecin, là où une personne non-autiste aurait réagi immédiatement, parce qu'elle aurait eu mal). Et je suis inquiète parce qu'au vu des symptômes externes, il y a un sérieux problème, peut-être une inflammation osseuse, peut-être une atteinte cardiaque, peut-être une atteinte rénale, l'hypothèse d'un cancer n'étant pas exclue, c'est seulement lorque j'aurai fait tous les examens d'investigation que le médecin pourra poser un diagnostic et me traiter en conséquence.  
 
Ce qui m'inquiète c'est que si j'ai une affection rénale ou cardiaque chronique et sévère, je ne serai pas en mesure de contrôler ma maladie puisque il me manquera un "baromètre" important: la douleur.  
 
Et le médecin qui me suit depuis maintenant 2 ans, depuis que j'ai  
déménagé, n'a pas encore compris comment je fonctionnais. Et justement, elle oublie toujours que j'ai une mauvaise perception de la douleur (et elle oublie aussi toujours que j'ai un trouble de la déglutition, du coup elle me prescrit régulièrement des médicaments sous forme de comprimés ou gélules que je ne peux pas avaler... et moi je ne pense jamais à lui rappeler que j'ai ce fichu trouble de la déglutition... le pharmacien lui, il a bien noté ce détail dans mon dossier, et justement cette fois-ci, il a été navré en regardant l'ordonnance, il a dit:  
"C'est dommage que votre médecin ait oublié que vous avez un trouble de la déglutition, le médicament indispensable qu'elle vous a prescrit existe sous forme de comprimés efferverscents mais elle vous a prescrit la forme sous gélules. Malheureusement je suis obligé de vous donner ce qui est inscrit sur l'ordonnance."  
 
Voilà, j'aurais besoin d'être accompagnée d'une personne qui explique tout cela aux professionnels de la santé, et qui pense à dire ce que j'oublie.  
Mais les AVS "classiques" ne sont pas autorisés à intervenir dans ce domaine.  
Le contrat de mon AVS stipulait que s'il entrait avec moi dans un cabinet médical, dentaire ou autre, ce serait considéré comme une faute professionnelle et que cela pourrait constituer un motif de licenciement pour lui.  
 
Par ailleurs, cet AVS et celle qui le remplaçait lorsqu'il était en congés, m'ont dit qu'ils n'étaient pas autorisés à communiquer leurs numéros de téléphone personnels aux personnes auprès desquelles ils interviennent, et cela afin parce que (je cite)  
"Il y a des gens qui abusent. Il y en a qui nous appellent des dizaines de fois par jour, parfois même la nuit, ou quand on est en congé. Il y a des gens qui nous prennent pour leurs larbins." Fin de citation.  
 
Ils m'ont expliqué grosso-modo qu'ils n'étaient ni des éducateurs, ni des travailleurs sociaux, ni des infirmiers, qu'ils sont payés pour un type d'intervention bien précis, et pour effectuer un certain nombre d'heures. Point. Comme les aides ménagères, en quelque sorte.  
 
Je sais que la directrice du service prestataire qui emploie mes anciens AVS est très stricte, et très pointilleuse sur la nature des prestations et sur le nombre d'heures effectuées par ses employés. Elle m'avait même demandé de ne pas trop fatiguer mon AVS ("Vous aimez marcher. Mais ne faites pas faire des dizaines de kilomètres à Mr. X. Ne me l'épuisez pas, hein !"), et elle m'avait déconseillé de lui demander de m'accompagner à la piscine, sous prétexte que je suis asthmatique. Au début j'ai cru qu'elle s'inquiétait pour moi, mais avec le temps j'ai compris que c'était pour son employé qu'elle se faisait du souci.  
 
J'ai aussi vite compris que ni mes AVS ni leur Directrice n'avaient d'états d'âme vis-à vis des personnes auprès desquelles ils intervenaient. Je me souviens que cela m'avait déçue, je m'attendais à être accompagnée par des personnes plus humaines que l'individu lambda, mais je me suis aperçue rapidement que ce n'étaient que des gens qui faisaient ce boulot comme ils en auraient fait un autre.  
 
Il m'est aussi arrivé d'avoir l'impression d'être une "chose"... une chose qui leur rapportait de l'argent. D'ailleurs, le fait qu'ils disent "mon client" ou "ma cliente" en parlant des personnes qu'ils aident à domicile est assez révélateur. Pour ma part, j'ai vite compris qu'ils n'étaient pas mes "Anges Gardiens".  
 
Bon, ils étaient sympas mes AVS, mais personnellement j'ai préféré me passer de leurs services et par demander la suspension de ma PCH (Prestation de Compensation de Handicap).
ASPERANSA
SATEDI
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